Dakar, 24 mars 2021 — Les autorités guinéennes devraient libérer immédiatement le journaliste Amadou Diouldé Diallo et veiller à ce que la presse puisse travailler sans crainte de représailles, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.
Le 27 février, des policiers ont arrêté Diallo, journaliste sportif sur la chaîne publique guinéenne Radio Télévision Guinéenne (RTG) et commentateur politique sur d’autres chaînes, alors qu’il faisait du sport dans un stade de Conakry, la capitale, selon l’avocat du journaliste, Alseny Aissata Diallo, qui s’est entretenu au téléphone avec le CPJ.
Les policiers ont conduit Diallo à la Direction de la police judiciaire, où il a été détenu jusqu’au 1er mars, date de sa comparution devant un procureur du tribunal de Conakry, où il a été inculpé d’offense au président Alpha Condé, selon les médias locaux et l’avocat du journaliste.
Le 2 mars, le journaliste a fait un malaise lors de sa détention et a été conduit au service de rhumatologie d’un hôpital local ; son avocat a déclaré au CPJ qu’il est toujours hospitalisé et demeure, strictement parlant, en détention pendant que la procédure judiciaire suit son cours.
En cas de condamnation en vertu de l’article 105 de la Loi sur la liberté de la presse de 2010 de la Guinée, portant sur l’offense au Président, Diallo pourrait être passible d’une amende de 1 à 5 millions de francs guinéens (100 à 500 dollars).
« Les autorités guinéennes devraient libérer immédiatement le journaliste Amadou Diouldé Diallo et mettre fin aux poursuites judiciaires à son encontre », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à New York. « L’arrestation et la détention de Diallo, sans parler de son harcèlement continu pendant son hospitalisation, favorise un climat de peur et constitue une violation flagrante des droits d’une presse libre. »
Diallo intervient régulièrement dans l’« Œil de Lynx », une émission radio matinale et quotidienne sur la politique, selon Boubacar Algassimou Diallo, également connu sous le nom d’Abou Bakr, co-animateur de l’émission et directeur de la radio Lynx, le média privé qui diffuse cette émission, avec qui le CPJ s’est entretenu au téléphone.
Lors d’une émission de l’« Œil de Lynx » diffusée le 21 janvier, Diallo « a expliqué que, selon lui, le gouvernement gérait mal le pays », a déclaré Abou Bakr au CPJ.
« Tout ce qu’il a dit est vérifié, c’est le fait de l’avoir dit qui fait mal », a déclaré son avocat. Il a ajouté que l’équipe juridique du journaliste avait contesté la détention de Diallo et demandé sa libération, mais que ces deux tentatives avaient été rejetées.
« Nous avons fait appel de cette décision [de rejet] et attendons les audiences », a déclaré l’avocat au CPJ. Il a également déclaré au CPJ aujourd’hui qu’un avocat représentant le tribunal devrait rendre visite au journaliste à l’hôpital demain.
Le 22 mars, le CPJ a contacté Sidy Souleymane Ndiaye, le procureur chargé de l’affaire contre Diallo, mais celui-ci a indiqué qu’il conduisait et qu’il ne pouvait pas parler. Le CPJ lui a envoyé plusieurs SMS pour solliciter ses commentaires, mais n’a reçu aucune réponse.
Auparavant, en août 2019, Abu Bakr et le fondateur de la radio Lynx, Souleymane Diallo, avaient tous deux été accusés de complicité de tentative d’atteinte à la sureté intérieure de l’État en vertu de la loi guinéenne sur la cybercriminalité suite à des commentaires critiques sur la gouvernance du pays formulés par une activiste dans la même émission « Œil de Lynx », selon Abou Bakr et les médias.
La loi sur la cybercriminalité a été utilisée pour poursuivre les journalistes parce que l’activiste était basée aux États-Unis et s’est exprimée dans l’émission par téléphone, a déclaré Abu Bakr. Il a indiqué au CPJ que les deux hommes avaient été placés sous contrôle judiciaire et il leur était interdit de quitter la capitale et devaient se présenter au tribunal trois jours par semaine.
Abu Bakr et Souleymane Diallo ont passé plusieurs semaines sous contrôle judiciaire ; en septembre 2019, ils ont gagné leur appel et les restrictions ont été levées, a déclaré Abu Bakr.