Jeudi, 21 juin 2018
President Muhammadu Buhari
Aso Villa, Yakubu Gowon Crescent,
The Three Arms Zone, Asokoro,
Abuja, FTC, Nigeria
Via email à :
Lai Mohammed, Ministre de l’information
Femi Adesina, Conseiller Special en Medias et Publicité du President Muhammadu Buhari
Garba Shehu, Assistant Conseiller Special en Medias et Publicité du President Muhammadu Buhari
Monsieur le Président Muhammadu Buhari,
Nous, membres du Comité pour la protection des journalistes (CPJ), organisation sans but lucratif qui défend la liberté de la presse dans le monde, et 20 autres organisations, vous écrivons pour appeler à la libération du journaliste Jones Abiri, détenu par le ministère de la Sécurité de l’État (DSS) du Nigeria depuis bientôt deux ans et pour appeler à ce que le DSS soit tenu de rendre compte de ses agressions à l’encontre des journalistes au Nigeria.
Malgré nos multiples demandes, lors de la visite du CPJ au Nigeria en avril 2018, nous avons été déçus de nous voir refuser l’autorisation de rendre visite à M. Abiri en détention. Lors d’une réunion avec le CPJ le 24 avril, 2018, Garba Shehu, votre porte-parole présidentiel, a confirmé que M. Abiri demeurait en détention sous la garde du DSS et a déclaré qu’il serait inculpé pour militantisme. Pourtant, après presque deux ans derrière les barreaux, M. Abiri n’a toujours pas vu l’intérieur d’une salle de tribunal et sa famille n’a reçu aucun renseignement relatif à sa santé et à son bien-être.
Le DSS opère sous la direction du coordinateur de la sécurité nationale, qui relève directement de vous-même, selon la loi sur les agences de sécurité nationale (National Security Agencies Act) de 1986. Par ailleurs, lors d’une visite au palais présidentiel (State House) en avril, Garba Shehu a précisé au CPJ que la détention continue de M. Abiri serait portée à votre attention personnelle. Nous appelons par conséquent à une intervention rapide de votre part en vue de la libération de M. Abiri et afin de garantir que ceux qui sont responsables de sa détention prolongée et illégaleseront tenus de rendre compte de leurs actions.
En février et mars 2018, le DSS a aussi arrêté Tony Ezimakor, chef du bureau du journal privé Daily Independent à Abuja. Le CPJ a documenté la détention d’une semaine d’Ezimakor, sans inculpation ni comparution devant un tribunal, durant laquelle le DSS a menacé le journaliste de poursuites pour terrorisme en raison de ses reportages.
Au cours des deux dernières années, le CPJ a essayé à plusieurs reprises, sans succès, de joindre Lawal Musa Daura, directeur général du DSS, et Gbeteng Bassi, directeur des opérations du DSS. De même, des journalistes nigérians ont affirmé avec consternation au CPJ qu’il leur est impossible de joindre le DSS pour obtenir des explications concernant l’éventuelle arrestation de leurs collègues. Lors de la même réunion avec le CPJ en avril 2018, Garba Shehu a confirmé que le DSS n’a désigné personne pour assurer la communication auprès du public nigérian. Nous vous exhortons à renforcer l’obligation de rendre compte et à faire en sorte que le DSS devienne plus accessible à la presse. Cela sous-entend la nomination d’un porte-parole du DSS.
Votre intervention en vue d’assurer la sécurité des journalistes et la promotion d’un dialogue ouvert par l’intermédiaire de la presse est d’autant plus essentielle que le Nigeria tiendra des élections en février 2019. Partout dans le monde, le CPJ a documenté la manière dont les agressions contre les journalistesse sont multipliées en période d’élections et lors d’autres processus politiques. C’est dans ce contexte que nous vous encourageons fortement à prendre des mesures décisives pour garantir que les journalistes seront libres de rendre compte sur les questions d’intérêt public, et qu’une culture d’autocensure ne viendra pas brouiller les processus de prise de décisions. Dans cette perspective, M. Abiri devrait être libéré sans plus tarder.
Sincèrement vôtre,
Joel Simon
Directeur exécutif
Comité pour la protection des journalistes
Shu’aibu Usman Leman
Secretaire National
Nigerian Union of Journalists
Wade H. McMullen, Jr.
Avocat Gerant
Robert F. Kennedy Human Rights
Elizabeth Chyrum
Directeur
Human Rights Concern – Eritrea
David Kode
Responsable Plaidoyer et Campagne
CIVICUS
Edmund YaKani
Directeur exécutif
Community Empowerment for Progress Organization, South Sudan
Zohrab Ismayil
Directeur de Campagne
Caucasus Civil Initiatives Center (CCIC)
Yared Hailemariam
Directeur
Association For Human Rights In Ethiopia (AHRE)
Dina Meza
Directrice exécutif
Asociación por la Democracia y los Derechos Humanos
ASOPODEHU-Honduras
Melanie Sonhaye Kombate
Directrice des programmes et de Plaidoyer
West African Human Rights Defenders Network (ROADDH/WAHRDN)
Rahman Gharib
President
Metro Center for Journalists Rights & Advocacy
Alphonsus B.M. Gbanie
Secretaire exécutif
Human Rights Defenders Network- Sierra Leone
Yemisi Ransome-Kuti
Directeur exécutif fondateur et membre du conseil d’administration
Nigeria Network of NGOs
Osai Ojigho
Directeur
Amnesty International – Nigeria
Cristina Palabay
Secretaire General
Karapatan – Philippines
Adilur Khan
Secretaire General
Odhikar – Bangladesh
Carles Torner
Directeur exécutif
PEN International
Folu Agoi
President
PEN Nigeria
Sulemana Braimah
Directeur exécutif
Media Foundation for West Africa
Tshivis Tshivuadi
Secrétaire Générale
Journaliste en Danger (JED-RDC)
Hannah Forster
Directrice exécutif
African Centre for Democracy and Human Rights Studies (ACDHRS)