New York, le 06 février 2009—Le journaliste en ligne, Bruno Ossébi, a été enterré aujourd’hui en République du Congo, suite à son décès lundi dernier à l’hôpital militaire de la capitale congolaise, Brazzaville.
M. Ossébi, qui était connu pour ses critiques et ses allégations de corruption à l’égard du gouvernement congolais, avait été grièvement brûlé dans un incendie nocturne à son domicile le 21 janvier. La mort de ce journaliste, qui se remettait prétendument de ses brûlures, a été surprenante. Cependant, les autorités congolaises n’ont fourni aucune information sur la cause et les circonstances de l’incendie, qui a coïncidé avec un incendie similaire au domicile d’un dissident politique congolais exilé en France.Des centaines de personnes se sont rassemblées aujourd’hui au principal cimetière de Brazzaville pour les funérailles de ce journaliste, mort à l’âge de 43 ans. Il était chroniqueur politique sur Mwinda, un journal en ligne de l’opposition congolaise basé en Europe, selon des journalistes locaux.
M. Ossébi, qui avait la double nationalité française et congolaise, souffrait de brûlures au second degré causées par un incendie non élucidé qui a tué sa compagne et les deux enfants de celle-ci âgés de 8 et 10 ans, selon les médias locaux. M. Ossébi serait décédé un jour avant son évacuation médicale en France.
Dans une interview avec le CPJ, le porte-parole de la police nationale du Congo, le Colonel Jean Aive Alakoua, a dit que les circonstances et la cause de l’incendie n’ont pas encore été déterminées. « Nous ne savons pas pour le moment si l’incendie est criminel ou accidentel » a-t-il dit, soulignant que certaines indications plaideraient pour une origine électrique, sans faire davantage de commentaires.
S’adressant aujourd’hui au CPJ, le procureur de la République du Congo, Alphonse Dinard Mokondzi, a indiqué que la déclaration d’un témoin oculaire faisait état de l’explosion d’un téléviseur au domicile de M. Ossébi.
Ainsi, l’Observatoire congolais des droits de l’Homme (OCDH) a déclaré au CPJ, par la voix de son directeur exécutif, Roger Bouka, qu’il fera des investigations indépendantes sur l’incendie et la cause du décès de Bruno Ossébi.
« Nous déplorons la mort de Bruno Ossébi et présentons nos sincères condoléances à sa famille et ses amis », a déclaré le directeur de la section Afrique du CPJ, Thom Rhodes. « Nous appelons les autorités congolaises à veiller à ce qu’une enquête approfondie et transparente soit menée », a-t-il martelé.
Par ailleurs, dans une interview avec le CPJ aujourd’hui, le ministre congolais de la communication, Alain Akouala, qui avait rendu visite M. Ossébi à l’hôpital, a déploré sa mort et indiqué qu’une enquête officielle est en cours. « C’est triste, car c’était quelqu’un qui participait à sa manière aux débats d’idées », a-t-il ajouté.
Il convient de remarquer que l’incendie du 21 janvier chez Bruno Ossébi avait coïncidé avec un incident identique au domicile du dissident politique congolais exilé en France, Benjamin Toungamani. Ces incendies s’étaient produits trois jours après la publication par Mwinda d’une interview exclusive avec M. Toungamani dans laquelle ce dernier accusait le président congolais, Denis Sassou-Nguesso, de corruption, selon des recherches du CPJ. Cependant, M. Toungamani n’a pas été blessé.
M. Ossébi et M. Toungamani envisageaient tous les deux de se porter partie civile dans une plainte internationale contre M. Sassou-Nguesso et les présidents de la Guinée Equatoriale et du Gabon voisins, selon Maud Perdriel-Vaissière, un avocat de Sherpa, un réseau international de juristes basé en France. En effet, en décembre dernier, Sherpa et Transparence Internationale, une organisation de lutte contre la corruption, avaient demandé une enquête sur la manière dont les présidents de ces trois pays africains riches en pétrole ont acquis leur riche patrimoine immobilier en France.
Il faut cependant souligner qu’au moins deux plaintes ont été déposées par ces chefs d’Etats contre ces organisations. En outre, les autorités gabonaises avaient arrêté en fin décembre dernier un fonctionnaire qui s’était porté partie civile dans cette affaire ainsi que deux journalistes, après avoir suspendu un journal local quelques mois auparavant pour la réimpression d’un article du quotidien français Le Monde portant sur le patrimoine du président Gabonais, Omar Bongo, à Paris.
M. Ossébi avait également sorti en janvier dernier un scoop révélant que la société nationale des pétroles du Congo aurait sollicité un financement d’un montant de 100 millions de dollars américains auprès d’une banque française du fait de la mauvaise gestion des profits pétroliers par le gouvernement congolais, selon des recherches du CPJ. Cependant, Il n’y avait pas eu de réaction officielle à ces allégations, selon des journalistes locaux.