Kinshasa, le 9 novembre 2022 – Les autorités de la République démocratique du Congo doivent revenir sur leur décision d’expulser la journaliste Sonia Rolley et cesser toute tentative d’intimidation de la presse, a déclaré mercredi le Comité pour la protection des journalistes.
Dans la matinée du mardi 8 novembre, le service de l’immigration de la RDC, la Direction Générale des Migrations (DGM), a convoqué et expulsé Rolley, journaliste française pour Reuters, selon Reuters et Radio France Internationale ainsi que des tweets du bureau de l’ONU aux droits de l’homme en RDC.
Rolley avait reçu l’autorisation de la DGM de couvrir une conférence sur le climat à Kinshasa, la capitale, en octobre, alors qu’elle attendait le résultat d’une autre demande d’accréditation pour prendre ses fonctions en RDC pour le compte de Reuters, selon ces sources. L’expulsion est intervenue « après le rejet de sa demande d’accréditation de journaliste », a déclaré Reuters.
« L’expulsion de la journaliste Sonia Rolley est un autre indicateur de la détérioration continue de la liberté de la presse en RDC », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à Johannesburg, en Afrique du Sud. « Les autorités de la RDC doivent revenir sur leur décision d’expulser Rolley et cesser tout acte d’intimidation contre la presse. »
Selon ces sources, des agents de la DGM ont saisi le passeport de Rolley lorsqu’elle est arrivée à leur bureau de Kinshasa suite à sa convocation ; elle a ensuite été emmenée à l’aéroport et mise dans un avion pour Paris, via Addis-Abeba, sans le reste de ses affaires. Une personne qui connaît bien l’affaire et qui s’est entretenue avec le CPJ sous couvert d’anonymat pour des raisons de confidentialité, a déclaré que le passeport avait été rendu à la journaliste à Paris.
Aujourd’hui, Rolley a publié un message sur Twitter exprimant sa gratitude pour les messages de soutien.
Reuters a déclaré dans un communiqué : « Nous apportons notre aide à Sonia Rolley et cherchons de toute urgence à obtenir des informations auprès des autorités congolaises », ajoutant que « Reuters continuera à faire des reportages sur la RDC de manière indépendante et impartiale, comme nous le faisons dans le monde entier ».
Selon le média local mediacongo.net, la DGM a prétendu qu’elle ne disposait pas du bon visa pour rester dans le pays. Dans un communiqué publié sur Twitter, le ministère de la Communication a déclaré que la décision d’expulser la journaliste n’avait rien à voir avec la liberté de la presse mais était une décision administrative.
Les appels du CPJ à Patrick Muyaya, ministre de la Communication de la RDC, qui gère l’accréditation des médias, et à Roland Kashwantale, administrateur général de la DGM, sont restés sans réponse.
Auparavant, Rolley a travaillé pour la radio française Radio France Internationale, période au cours de laquelle elle a largement couvert la politique, les conflits, les droits de l’homme et la corruption en RDC. En 2021, elle a notamment travaillé sur l’enquête dite Congo Hold-up investigation, qui a révélé le détournement présumé de fonds publics par des élites de la RDC.
Le CPJ a documenté des attaques et des menaces répétées contre des journalistes en RDC au cours des derniers mois. Le groupe local de défense de la liberté de la presse, Journaliste En Danger, a publié début novembre un rapport faisant état de « menaces à peine voilées contre la presse indépendante » de la part de l’armée du pays et d’une « réduction de la validité des accréditations, qui doivent être renouvelées tous les six mois ».