Abuja, Nigeria, le 03 février 2015- Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a aujourd’hui demandé aux autorités nigérianes de tout mettre en œuvre pour accorder aux journalistes internationaux le visa d’entrée afin qu’ils puissent couvrir les élections prévues ce mois.
Les élections présidentielles et parlementaires sont prévues le 14 février au Nigeria, tandis que les élections fédérales sont fixées au 28 février. Le président Goodluck Jonathan brigue un autre mandat dans un contexte d’insurrection menée par le groupe islamiste radical Boko Haram qui a gagné du terrain dans le nord-est du pays. Les observateurs internationaux ont appelé le Nigeria à assurer une élection libre et équitable, tandis que certains analystes ont prévu un faible taux de participation du fait des craintes de violence, selon des médias.
« La légitimité des élections au Nigeria dépend en grande partie du fait que la presse internationale soit autorisée à les couvrir », a déclaré Peter Nkanga, représentant du CPJ en Afrique de l’Ouest. « Nous appelons les autorités à réduire rapidement les formalités administratives et accorder des visas et des accréditations aux journalistes étrangers », a-t-il ajouté.
Kayode Idowu, porte-parole de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) du Nigeria, a déclaré au CPJ que pour que les journalistes étrangers soient autorisés à couvrir les élections, ils sont censés arriver au Nigeria, demander leur accréditation et obtenir leurs cartes de presse pour les élections auprès de la CENI au plus tard le 11 février.
Geoffrey York, correspondant du quotidien canadien Globe and Mail basé à Johannesburg, a écrit sur Twitter la semaine passée que le Nigeria avait bloqué l’entrée à au moins 40 journalistes souhaitant couvrir les élections. L’Association des correspondants étrangers d’Afrique australe a publié vendredi une déclaration indiquant qu’on avait refusé le visa et l’accréditation à beaucoup de ses membres.
Les journalistes d’une agence de presse internationale, qui ont demandé que le nom de l’agence ne soit pas divulgué comme elle continue à demander l’autorisation pour couvrir les élections, ont déclaré au CPJ avoir fait huit différentes demandes de visa à partir de divers endroits, notamment Paris, Londres, Nairobi, Dakar et Johannesburg. Toutes les demandes formulées, entre décembre 2014 et janvier 2015, avaient été retardées par des fonctionnaires des ambassades qui demandaient des papiers supplémentaires, selon l’agence.
Toutefois, le visa d’entrée a été accordé à certains journalistes internationaux. En effet, des journalistes du New York Times, de la BBC et la chaîne de télévision RTL Nieuws basée aux Pays-Bas ont confirmé au CPJ avoir obtenu leurs visas.
Les difficultés liées à l’obtention des visas peuvent être associées à des différences dans le processus de demande d’une ambassade à une autre et entre les ambassades et le service d’immigration du Nigeria.
Selon les directives sur le site Web dudit service, les journalistes peuvent demander des visas en remplissant un formulaire de demande, payant des frais, et en envoyant les reçus de paiement, passeport et autres documents à l’ambassade du Nigeria dans leur pays de résidence. Chukwuemeka Obua, porte-parole du service d’immigration du Nigeria, a déclaré au CPJ qu’il n’y a pas de procédure spéciale de demande pour les journalistes.
Cependant, sept autres journalistes, sous couvert de l’anonymat, ont déclaré au CPJ que les fonctionnaires de l’ambassade du Nigeria demandaient aux journalistes internationaux de se procurer des lettres d’approbation du ministère nigérian de l’Information à Abuja. Les sites Web de certains ambassades et consulats du Nigeria, notamment à Paris, et en Ontario à Ottawa, Canada ont également indiqué que l’entrée des journalistes requiert une approbation du ministère de l’Information.
Joseph Mutah, porte-parole du ministère nigérian de l’Information, a déclaré au CPJ que toutes les demandes de visa ont été envoyées au directeur général de l’Agence nationale de renseignement (National Intelligence Agency, NIA) pour le contrôle de sécurité et l’approbation.
Il convient de souligner que la NIA est sous la tutelle du cabinet présidentiel. Toutefois, les porte-paroles du président, Reuben Abati et Doyin Okupe, n’ont pas répondu aux appels et aux messages du CPJ pour des commentaires.
Par ailleurs, des voyous ont attaqué au moins cinq journalistes locaux lundi suite à l’explosion d’une bombe dans l’État de Gombe, dans le nord du Nigeria, selon des médias. L’explosion s’est produite quelques minutes après que le convoi du président Goodluck Jonathan a quitté les lieux suite à un meeting électoral. Le bus des journalistes a également été endommagé.