Lagos, Nigeria, le 14 novembre 2012–Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) appelle les autorités tchadiennes à enquêter sur des allégations selon lesquelles le maire de la ville méridionale de Doba et ses proches intimideraient des journalistes travaillant pour une station de radio communautaire privée.
Alnodji Mbairaba Jean-paul, rédacteur en chef de La Voix du Paysan, a déclaré au CPJ que lui et deux autres journalistes ont été intimidés et menacés par Lamlengar Ngasebey, maire de la ville, ainsi que des membres de sa famille. La Voix du Paysan avait diffusé les 20,21,28 septembre dernier une série de reportages dans lesquelles des citoyens locaux avaient accusé M. Ngasebey d’abus de pouvoir, de mauvaise gestion et de pratiques d’embauche douteuses favorisant les femmes attirantes, ont indiqué des journalistes.
M. Alnodji a déclaré au CPJ que le maire l’avait appelé dans son bureau le 25 septembre dernier et qu’il lui avait dit qu’il essayait d’empêcher certains membres de sa famille d’incendier la station. «Il a essayé de m’intimider en m’affirmant qu’il allait empêcher sa famille de brûler la station», a souligné M. Alnodji.
D’autre part, l’Union des radios privées du Tchad a rapporté dans un communiqué de presse le 26 septembre dernier, l’agression de Felix Djimadoumngar, journaliste de La Voix du Paysan, dans l’enceinte d’un commissariat de police. M. Djimadoumngar a déclaré au CPJ qu’il avait subi des blessures au cou, au dos et aux jambes à la suite de l’agression qui aurait été perpétrée par des membres de la famille de M. Ngasebey et ses partisans. M. Alnodji a également indiqué que les assaillants avaient intimidé Severin Meldewei, animateur de la station, dans la cour du même poste de police.
M. Ngasebey a nié toutes ces allégations lorsque le CPJ l’a contacté par téléphone. «Des gens ont véhicule des mauvaises informations sur moi. J’ai été injustement attaqué » a-t-il affirmé. Interrogé au sujet des journalistes de La Voix Du Paysan qui seraient intimidés par ses partisans, il a déclaré: « je n’ai rien à vous dire ».
M. Alnodji a déclaré au CPJ qu’il avait sollicité des droits de réponse de Ngasebey avant de diffuser chaque reportage, mais que le maire avait refusé d’émettre des commentaires. Le rédacteur en chef a affirmé qu’il avait de nouveau cherché à recueillir le point de vue du maire après que les reportages ont été diffusés.
«Nous sommes alarmés par les allégations d’intimidation de journalistes de La Voix du Paysan qui n’ont fait que donner la parole aux citoyens locaux se plaignant du comportement du maire », a déclaré Mohamed Keita, coordonnateur du plaidoyer pour l’Afrique du CPJ basé à New York. « Nous demandons au ministère de la Sécurité du Tchad d’ouvrir des enquêtes sur ces allégations d’intimidation, car elles mettent en cause la plus haute autorité de Doba », a-t-il ajouté.
Le rédacteur en chef de La Voix du Paysan a déclaré au CPJ que la station avait déposé une plainte officielle, mais que les autorités n’avaient pas donné suite celle-ci.
Abdoulaye Georges Moyalta, directeur général de la police nationale du Tchad, a déclaré au CPJ que la police n’a rien trouvé qui puisse servir de fondement aux menaces d’incendie criminel, mais a confirmé l’agression impliquant M. Djimadoumngar et a souligné qu’elle avait été résolue depuis. Cependant, l’inspecteur Moyalta a refusé de faire d’autres commentaires.
Le 10 octobre dernier, le Haut conseil de la communication du Tchad a adressé une mise en demeure à La Voix du Paysan, accusant l’émission diffusée en direct sur la station le 30 septembre d’inciter la population à l’insurrection contre le gouvernement, selon M. Alnodji. La station avait diffusé le sermon d’un évêque italien qui avait critiqué le gouvernement pour avoir prétendument manqué de faire bénéficier à la région des richesses pétrolières, a déclaré le rédacteur en chef.
- Pour plus de données et d’analyses sur le Tchad, veuillez cliquer ici.