New York, le 18 mai 2012- Les autorités du Rwanda détiennent un présentateur de radio sans inculpation depuis le 24 avril dernier pour avoir prétendument prononcé des termes considérés comme une offense aux rescapés et aux victimes du génocide de 1994, selon des médias et des journalistes locaux.
Habarugira Epaphrodite, reporter et présentateur de Radio Huguka, une station de radio communautaire basée à Gitarama, la deuxième plus grande ville du Rwanda, a été placé en détention provisoire pour un lapsus qu’il aurait commis en présentant un journal le 22 avril dernier, a déclaré au CPJ le directeur de ladite station, Eugène Ndekezi.
M. Ndekezi a dit que le journaliste a fait en langue kinyarwanda une confusion entre les termes «victimes» et «rescapés» en lisant un communiqué sur les cérémonies de commémoration du génocide rwandais au cours d’un bulletin d’information du matin. Le journaliste est accusé d’avoir insinué la confusion entre les rescapés et les auteurs du génocide, a rapporté le quotidien pro-gouvernemental The New Times.
M. Ndekezi a déclaré au CPJ qu’il s’agissait d’un lapsus, soulignant que le journaliste avait lu le même communiqué un jour plus tôt sans erreur. Le 3 mai, le procureur de Gitarama a prolongé la détention provisoire de M. Epaphrodite pour 30 jours en attendant une enquête plus approfondie, malgré le fait que le journaliste ait reconnu les faits et présenté des excuses, a souligné M. Ndekezi.
« Pour un lapsus, M. Epaphrodite a été contraint de passer plus d’un mois en prison », a déclaré Tom Rhodes, consultant du CPJ pour l’Afrique de l’Est. «Les autorités doivent le libérer immédiatement », a-t-il martelé.
Dans une autre affaire liée à la sensibilité du traitement de l’information sur le génocide, la Cour suprême rwandaise a rendu le 5 avril dernier son verdict sur un appel de l’ancienne rédactrice en chef du journal Umurabyo, Agnès Uwimana, et de son adjointe Saidati Mukakibibi, réduisant ainsi leurs peines de prison de 17 et sept ans à quatre et trois ans, respectivement. Mme Uwimana et Mukakibibi avaient été initialement accusées et arrêtées en juillet 2010, puis condamnées en janvier 2011 sous des accusations de négation du génocide et d’incitation à la division ethnique pour des articles publiés dans le tabloïd bimensuel Umurabyo en 2009, selon des journalistes locaux. Dans son verdict en appel, la cour a levé les charges de négation du génocide, mais a confirmé les accusations d’incitation aus troubles à l’ordre public et de diffamation du chef de l’Etat, ont confié au CPJ des journalistes locaux.