New York, le 14 juin 14, 2013— Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a aujourd’hui demandé aux autorités du Cameroun d’enquêter sur des informations selon lesquelles un officier supérieur du Bataillon d’intervention rapide (BIR) aurait menacé des journalistes, les empêchant de faire des reportages sur le lieu d’un accident d’avion lundi dernier.
«Nous sommes préoccupés par les allégations d’intimidation de journalistes impliquant un officier du BIR du Cameroun», a déclaré Mohamed Keita, coordonnateur du Plaidoyer pour l’Afrique du CPJ. « Nous demandons aux autorités judiciaires de mener des enquêtes crédibles et de sanctionner tout militaire impliqué », a-t-il martelé.
Un petit avion parti de N’Djamena, la capitale tchadienne, pour Douala, la capitale économique du Cameroun, s’est écrasé lundi dernier dans la ville de Ngaoundéré au nord du Cameroun tuant un passager et a faisant quatre blessés, a rapporté l’Agence France-Presse.
Le BIR, une unité d’élite de l’armée, est ainsi intervenu pour sécuriser le lieu de l’accident en collaboration avec la police, selon des journalistes locaux et des médias.
Toutefois, un officier supérieur de la BIR aurait ordonné aux services de sécurité d’empêcher les journalistes de médias privés de se rapprocher du lieu de l’accident, tout en laissant passer les autorités locales et des journalistes de la chaîne publique Cameroun Radio Télévision (CRTV), selon le Syndicat national des journalistes du Cameroun et des témoignages recueillis par le CPJ. Les journalistes censurés ont affirmé avoir été menacés par le même officier.
Salomon Kankili, reporter du journal indépendant Le Messager, a déclaré au CPJ que l’officier du BIR l’a attrapé par le cou et l’a jeté sur le sol après qu’il lui a demandé la raison de ces restrictions. Le militaire en question aurait menacé d’abattre Kankili et un autre journaliste, Adolarc Lamissia, du quotidien Le Jour, si ces derniers publient quelque chose le concernant, ont rapporté le syndicat des journalistes et Le Messager.
Une autre journaliste de la chaîne privée Camnews24, Joseph Mouafo, a déclaré au CPJ que le même militaire a menacé de détruire sa caméra s’il filme le lieu de l’accident, même à distance. Mouafo et Clevis Moussa, journaliste de la chaîne de télévision Equinoxe, ont été chassés des lieux, a-t-il dit.
Le commandant régional du BIR, le Lt. Pioka, n’a pas immédiatement répondu aux appels téléphoniques ni aux textos du CPJ.
Le BIR, qui est sous la tutelle du ministère de la Défense, a pour mission de lutter contre la criminalité et l’insécurité générale dans les régions frontalières, mais il est aussi intervenu pour réprimer des manifestations politiques, selon des recherches du CPJ. La presse locale a rapporté des allégations de fusillades, d’agressions, de harcèlement et même de meurtres de civils par des militaires dudit bataillon. En 2010, au moins 16 miliaires du BIR avaient été radiés pour mauvaise conduite, selon les médias.
Le ministère camerounais de la Défense a indiqué qu’il allait enquêter sur les allégations de menaces et d’agression. Il convient de souligner que le gouverneur de la région, Abakar Ahamat, et le chef de gendarmerie, le colonel Guy Beyegue, ont déclaré au CPJ qu’ils n’avaient donné aucune instruction pour empêcher aux journalistes de faire des reportages sur le lieu de l’accident d’avion.
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