New York, le 21 décembre 2010– Les autorités de la ville d’Uvira dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) devraient tout entreprendre pour libérer immédiatement le journaliste Robert Shemahamba, qui est détenu depuis vendredi par l‘Agence nationale de renseignements (ANR) de la RDC, a déclaré le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Des agents de l’ANR ont placé en détention M. Shemahamba, directeur de la Radio Télé Mitumba, une station communautaire émettant à Uvira, après son refus de se soumettre à un interrogatoire sans avocat, a déclaré au CPJ le directeur des programmes de ladite station. L’interrogatoire était en rapport avec l’émission d’actualité-débat Franc-parler que Shemahamba a modéré le 12 décembre. Ce jour-là, ses invités, notamment trois politiciens de l’opposition, avaient critiqué des responsables municipaux d’Uvira sur la base d’allégations de mauvaise gestion. Les responsables municipaux cités dans les allégations, le chef de cité d’Uvira, Joseph Mbarato, et l’administrateur adjoint chargé des finances Victor Mukubito Chomachoma, ont nié ces allégations, selon des journalistes locaux. Par ailleurs, un conseil de sécurité municipal avait ordonné l’interdiction de cette émission hebdomadaire à la Radio Télé Mitumba depuis la semaine dernière, selon des sources locales.
Dominique Kalonzo, un journaliste local qui a participé au débat du 12 décembre, est entré dans la clandestinité depuis cette semaine après avoir reçu une convocation de la police pour un interrogatoire dans le cadre de cette affaire, a-t-il dit au CPJ depuis un endroit indéterminé.
« Il est scandaleux qu’un journaliste se fasse arrêté dans l’exercice de son droit de se faire assister d’un défenseur de son choix devant les services de sécurité, un droit garanti par l’article 19 de la constitution de la RDC », a déclaré le coordonnateur du plaidoyer pour l’Afrique du CPJ, Mohamed Keita. « Robert Shemahamba doit être libéré immédiatement et l’interdiction de son émission de radio levée sans délai », a-t-il ajouté.
Avant son arrestation, M. Shemahamba avait déjà été interrogé pendant plusieurs heures par un procureur local et des membres d’un conseil municipal de sécurité, selon des journalistes locaux. Dans une interview avec le CPJ aujourd’hui, le chef de cité d’Uvira a accusé le journaliste d’avoir permis à ses invités d’« insulter le chef de l’Etat » au cours de son émission, faisant allusion à des commentaires critiquant un discours du président congolais Joseph Kabila sur l’état de la nation.
Cependant, le ministre congolais de la communication et porte-parole du gouvernement, Lambert Mendé Omalanga, a déclaré au CPJ qu’il a protesté contre l’arrestation de M. Shemahamba et a appelé le ministre de l’intérieur du pays à résoudre cette affaire. « Nous n’avons pas de police politique dans ce pays », a-t-il ajouté.